Cette présentation a été faite dans le cadre des Z-apéros du Club le 27 novembre 2020.
L’objectif d’un vaccin est d’entraîner le système immunitaire à lutter contre un microbe responsable d’une maladie potentiellement grave ou mortelle, que ce microbe soit une bactérie, un virus voire un parasite. Jusqu’à présent, les vaccins étaient fabriqués à partir du virus lui-même utilisant :
- un microbe entier, vivant atténué (rougeole, oreillons, rubéole, varicelle)
- un microbe entier, tué inactivé (poliomyélite, méningite, hépatite)
- un microbe purifié, s’appuyant sur des fragments de microbes nécessaires à sa reconnaissance par le système immunitaire (tétanos, coqueluche, grippe saisonnière).
Avec la Covid-19, émerge un nouveau type de vaccin basé sur l’ARN messager, injectant un fragment du code génétique du virus; l’idée est d’utiliser la protéine S du virus qui lui permet de se lier à la cellule, la cellule l’absorbe, produit à son tour la protéine S virale qui est reconnue comme un corps étranger par le système immunitaire: ainsi, est induite et stimulée la production d’anticorps et de lymphocytes T. Cette technologie nouvelle à mi-chemin entre progrès et innovation est un progrès disruptif dans la recherche médicale. L’ARN injecté peut l’être nu, délivré directement en solution ou vectorisé, le vecteur le plus utilisé étant des nanoparticules lipidiques (cas des vaccins de Pfizer et Moderna).
La rapidité de la mise au point des vaccins est remarquable: 1 an (janvier 2000 - décembre 2020) aura suffi pour passer de la reconnaissance du virus responsable de la maladie à la commercialisation d’un vaccin permettant de lutter contre cette maladie; jusqu’à présent, la mise au point d’un vaccin prenait entre 10 et 15 ans, voire 20 ans.
Les vaccins les plus avancés utilisent la technique de l’ARNm: Pfizer associé à une société allemande BioNTech et Moderna en partenariat avec le biochimiste Bâlois, Lonza, le site de production étant dans le Valais à Viège. Viennent ensuite AstraZeneca associé à l’université d’Oxford qui utilise un virus modifié et Sanofi-Pasteur associé à GSK qui utilise un virus atténué, sans omettre les vaccins russe (Spoutnik) et chinois (Sinopharm, Sinovac).
L’efficacité des vaccins de Pfizer et de Moderna est très forte, 95 %, ce qui est remarquable en considérant, par exemple, l’efficacité du vaccin contre la grippe 50 à 70% selon les années et les souches virales.
Les effets secondaires sont faibles, aucun effet indésirable majeur n’a été rapporté dans toutes les études pré-cliniques et cliniques de phase 3; les effets indésirables bénins associent céphalées, fatigue ou courbatures.
Trois interrogations majeures demeurent (réponses dans les phases 4 à venir):
- l’efficacité à long terme: l’efficacité observée dans les 2-3 premiers mois persistera-elle sur un recul plus long.
- les éventuels effets indésirables à long terme, le recul actuel étant de 2-3 mois
- le type de protection induite: contre la maladie, contre les formes sévères et graves, contre la transmission du virus.
Modalités d’injection : deux injections distantes de trois semaines environ par voie intramusculaire; la vaccination ne sera pas obligatoire, un consensus européen va en ce sens, confirmé pour la Suisse par le ministre de la Santé (Alain Berset) et l’OFSP.
Date de commercialisation: dès que les dossiers déjà déposés (Pfizer, Moderna, AstraZeneca) de demande d’homologation seront validés par les agences concernées : Swissmedic pour la Suisse, l’Agence Européenne du Médicament pour l’Europe, la FDA pour les États-Unis, l’OMS pour le monde.
La commercialisation suppose de résoudre plusieurs questions : la capacité de production en accord avec la demande, le transport et la conservation du vaccin (entre -70 et - 80° pour Pfizer et Moderna), les modalités de sa distribution et les personnels qui pratiqueront la vaccination.
Date de mise en œuvre de la vaccination: pour les plus optimistes, avant la fin de l’année 2020 dans la deuxième quinzaine de décembre; pour la majorité dont l’OFSP, janvier et premier trimestre 2021; à l’été 2021, le nombre de doses produites pour l’ensemble des vaccins sera de plusieurs milliards et devrait suffire pour couvrir la demande.
Populations prioritaires: un consensus s’est établi autour des seniors, des personnes fragiles présentant une pathologie (diabète, obésité, cancer), des professionnels de santé; dans un deuxième temps, les personnes de moins de 65 ans présentant une morbidité ou une pathologie affaiblissant leurs défenses immunitaires; l’Allemagne a communiqué ses priorités le 19 novembre: les personnes à risque, les professionnels de santé et les professions essentielles (enseignants et policiers).
Reste une inconnue que tentent d’évaluer les instituts de sondage: l’adhésion de la population au vaccin; ce pourcentage guidera d’éventuelles incitations gouvernementales pour convaincre la population de se faire vacciner.
Francis Michot